Est-ce qu'on quitte son patron ou son emploi?
Par Johanne Menard
Contributrice de Monster
En voilà toute une question! Sans doute commande-t-elle une réflexion plus approfondie si on a un patron qui nous donne de l’urticaire depuis un bon moment! Nous tenterons ici d’élucider quelques aspects de ce sujet plus complexe qu’il n’y paraît.
Quitter son emploi : c’est sérieux!
De prime abord, je dirais que prendre la décision de quitter son emploi n’est jamais un geste à prendre à la légère. Sauf dans certaines circonstances très rares et exceptionnelles où il vaut parfois mieux agir plus rapidement que de traîner, la décision de quitter un emploi doit être mûrement réfléchie. Et même lorsque les raisons pour quitter sont de nature importante parce qu’elles nous causent un préjudice grave que ce soit au niveau de notre santé physique, psychologique, financière ou sociale, il faut prendre des précautions afin d’en minimiser les conséquences négatives.
J’aime mon patron mais pas mon emploi!
Voilà une possibilité! Qu’est-ce qu’on peut faire si on se retrouve dans cette situation?
- On peut toujours partager son état d’âme au sujet de son emploi avec son patron en lui disant ce que l’on préférerait en prenant soin d’éviter d’avoir un ton exigeant un changement. On fera attention de ne pas confondre le déplaisir ayant trait à la nature même du travail (tâches, rôle, responsabilités, subordination, etc.) et les conditions (horaire, lieu de travail, vacances allouées, etc.) dans lesquelles on exerce cet emploi.
- C’est la bonne occasion de mesurer ce que l’on retire véritablement de cet emploi, non seulement au niveau de la satisfaction découlant de l’accomplissement de la fonction mais aussi du plaisir de travailler et d’apprendre en harmonie avec un patron avec qui on a une bonne chimie. Cela vaut de l’or d’être en mesure de travailler dans un climat agréable avec un supérieur qui a les compétences pour soutenir notre développement et nous aider à grandir professionnellement. Il vaut parfois la peine de tolérer, voire d’endurer, et ce, durant une certaine période, un niveau d’ennui dans l’exécution des tâches en se disant que la compensation pour cet inconfort est de s’épanouir grâce aux bonnes relations interpersonnelles qui règnent dans le milieu de travail.
La décision dépendra du seuil de tolérance de chacun, de ses ambitions, de ses valeurs personnelles au moment où il vit cette situation dans son travail. Pour certains, il en va d’une urgence de passer à autre chose car l’accomplissement personnel passe d’abord et avant tout par la satisfaction inhérente aux tâches accomplies. Pour d’autres, d’une nature plus grégaire ou sensible, les bonnes relations peuvent primer sur l’intérêt lié à la nature même de l’emploi.
Les signaux qu’il faut songer à passer à autre chose…
- Il faut penser à son plan de carrière à plus long terme si l’on caresse d’autres ambitions. Piétiner dans un emploi que l’on n’aime pas vraiment peut finir par nuire à l’accession à d’autres postes qui nous conviendraient mieux.
- On aura beau aimer son patron, il faut quand même s’intéresser suffisamment à son boulot pour y donner un rendement satisfaisant. Une baisse de rendement est un signal important à ne pas négliger.
- Les patrons passent, les emplois demeurent. Il faut penser qu’un jour, le patron tant aimé pourra s’en aller. Voudrait-on se retrouver dans cette situation? Plutôt que de subir une telle conjoncture peu réjouissante, il vaut sans doute mieux commencer plus tôt que tard à rechercher une situation d’emploi où l’on conjuguera plaisir au travail et plaisir avec le patron.
- Si l’on se rend compte qu’on vient au travail à reculons ou qu’on en ressort un peu sur la « déprime » parce ce que l’essentiel du travail ne nous satisfait pas, il faut penser à franchir le prochain pas et regarder vers d’autres avenues de travail.
J’aime mon travail mais je n’aime pas mon patron!
Voilà l’autre côté de la médaille! Ne pas « aimer » son patron peut prendre différentes formes…
- Le conflit de valeurs : J’estime qu’une forme sérieuse de non-amour de son patron se produit lorsqu’il y a un conflit de valeurs important entre ce dernier et son employé. Que ce choc de valeurs soit réel ou perçu, il met en péril la synergie des efforts réciproques, l’efficacité des communications et augmente le risque des occasions de manque de respect mutuel. Prenons l’exemple d’un employé qui veut bien faire les choses, qui a tendance à être méticuleux et perfectionniste et qui est confronté à un patron dont l’aspiration est d’obtenir des résultats rapides, peu importe qu’ils soient bâclés ou non! Au quotidien, ce frottement de valeurs est un terreau fertile pour des divergences importantes pouvant motiver un départ.
- Le style de gestion : Tout comme il y a des personnes dont les façons d’être et d’agir ne nous « reviennent » pas, il y a des patrons dont le style de gestion ne cadre pas avec nos préférences! Leurs manières de communiquer, de donner de la rétroaction (ou pas), de diriger, etc. nous apparaissent inefficaces, irritantes, etc. Le style autocratique excessif ou le style laisser-aller chronique de certains gestionnaires auront raison de la tolérance des meilleurs employés! La rudesse verbale, l’impolitesse, le manque de courtoisie de base, les propos voisinant le harcèlement psychologique, l’absence de communication, etc. sont quelques-uns des paramètres du style de gestion qui peuvent miner le moral des employés et les amener à vouloir quitter leur employeur.
Un bémol s’impose ici, selon moi. Un patron bien différent de soi ne veut pas nécessairement dire qu’il est un « mauvais » patron et qu’il faut le quitter à tout prix. Ce dernier représente, à sa façon, l’autre moitié du monde, celle qui ne nous ressemble moins et celle dont on peut apprendre beaucoup afin de devenir meilleur soi-même. On aura tout avantage à cultiver un niveau de sécurité personnelle suffisant pour accueillir cette différence même si elle nous interpelle.