S'Exiler pour travailler
Pourquoi pas?
Par Johanne Menard
Contributrice de Monster
Le dicton qui veut que « nul est prophète en son pays » vaut parfois quand on recherche un emploi, surtout lorsqu’il s’agit de son entrée dans le domaine choisi. Malgré la pénurie de main d’œuvre qualifiée dans certains secteurs, il reste que se trouver un emploi constitue plus souvent qu’autrement un défi pour la grande majorité des travailleurs. Rarissimes sont les individus qui ont n’ont jamais eu à faire des efforts pour se trouver un boulot.
Quand la manne d’emplois ne vient pas avec le territoire
Le taux de chômage varie selon les régions du Québec et du Canada. Dans certains secteurs d’emploi, ces variations sont davantage saisonnières que sectorielles. D’autres creux dépressionnaires de l’emploi sont attribuables à des situations ponctuelles comme c’est le cas lorsque des entreprises ferment leurs portes ou des industries souffrent des contrecoups financiers de la mondialisation. Bref, dans certaines régions, les jeunes étudiants et travailleurs sont habitués au fait que la précarité d’emploi fait partie de leur vie et envisagent déjà l’éloignement de leur région afin de pouvoir gagner leur vie. Pour eux, c’est écrit dans le ciel : il faudra aller voir ailleurs pour dénicher le boulot convoité.
Le temps d’un été ou d’une mutation
Il y a aussi un dicton qui veut que « les voyages forment la jeunesse »! Peut-être que cette formule s’applique aussi à l’expérience de travail. Quel jeune n’a pas rêvé, à tout le moins le temps d’été, d’aller gagner sa croûte ailleurs que dans sa ville natale?
En effet, quand on n’arrive pas à trouver un emploi près de chez soi, pourquoi ne pas envisager en chercher un ailleurs…ne serait-ce que pour quelques mois? La même réflexion s’applique sans doute à l’offre de mutation qu’un employeur peut offrir à un employé déjà en poste. Pourquoi ne pas y voir l’occasion d’enrichir son bagage d’expérience? Au Québec, existe le programme d’échange interprovincial et depuis le début de ce programme, plus de 9 000 étudiantes et étudiants des provinces participantes ont acquis de l’expérience dans leur domaine d’études tout en découvrant une autre région du Canada.
Les avantages d’aller ailleurs
Nous avons au Canada le grand privilège d’avoir un vaste pays aux régions très différentes les unes des autres. Pour les fins du travail, hormis dans certains circonstances bien précises, franchir les frontières provinciales ne constitue pas de problème en soi. En effet, il n’y a pas de restrictions à proprement parler, hormis celles reliées aux exigences professionnelles telles les appartenances obligatoires à des ordres professionnels, l’obtention de cartes de compétences ou de permis d’exercice, etc. qui limitent le passage d’une province à une autre. Mais quels sont donc les mérites rattachées à cette approche? Améliore-t-on vraiment son employabilité de cette façon? Selon moi, travailler hors de son patelin peut aider à :
· Optimiser ses chances d’occuper un travail qui cadre bien avec ses véritables intérêts;
· Développer sa capacité d’adaptation à d’autres contextes organisationnels, d’autres façons de faire ce qui constitue une compétence hautement valorisée par les employeurs d’aujourd’hui;
· Développer des compétences personnelles telles la débrouillardise, la capacité d’initiative, la persévérance, le sens de l’organisation ;
· Acquérir une expérience de travail pertinente dans un autre contexte géographique ce qui est prisée par les employeurs de sa localité;
· Rehausser la valeur de son expérience de travail. En effet, le travail fait à l’extérieur de son milieu attirera sans doute l’attention des recruteurs éventuels et enrichira un curriculum vitae.
L’apprentissage d’une autre langue
Une expérience de travail dans une autre province peut également permettre d’apprendre une langue seconde comme l’anglais. Combien de gens disent qu’ils veulent améliorer leur capacité de converser en anglais, suivent cours par-dessus cours, sans jamais vraiment devenir bilingue. Occuper un emploi dans un milieu anglophone est parfois la meilleure façon de « régler ce problème » et d’améliorer sa capacité linguistique. Si tel est son objectif, un emploi comportant du service à la clientèle, ou des contacts verbaux réguliers dans la langue de Shakespeare seront à privilégier.
Le réseautage
C’est parfois quand on est ailleurs que chez soi que l’on se trouve, un peu par la force des choses, davantage motivés sinon obligés de communiquer avec les gens qui se retrouvent dans notre entourage. Si l’on veut vraiment profiter d’une période de travail en dehors de son milieu, on a tout intérêt à s’intéresser aux gens qui font partie de notre nouvel environnement, aux habitudes culturelles, à la vie sociale, etc. Si l’on y met du sien, les efforts de réseautage ainsi déployés, pourront être utiles une vie durant puisque les moyens technologiques de communication actuels nous permettent de nourrir ces contacts avec pérennité.
Les désavantages peuvent-ils être contrés?
Je vous entends me dire que l’idée d’aller travailler ailleurs a certes ses avantages mais qu’elle est bien coûteuse. Certes, vous avez raison : il y a des coûts certains à un tel choix. Mais ceux-ci peuvent être endigués si on est prêt à faire certains sacrifices. En voici quelques-uns à contempler :
· Accepter de vivre au sein d’une famille d’accueil, dans une chambre avec pension. Ce sera l’occasion de côtoyer des gens de la localité de plus près, de bénéficier de leurs conseils et de limiter les coûts d’hébergement;
· Choisir de vivre avec des colocataires le temps d’un été afin de partager les dépenses de loyer et de nourriture;
· Voir ce séjour de travail comme étant doublé d’une expérience de voyage en profitant au maximum des découvertes à faire sur les lieux qui ne comportent pas de dépenses importantes : entrées gratuites dans des musées, visites des parcs, balades en vélo, randonnées pédestres, etc.
Élargir ses horizons, c’est souvent gratifiant!
Travailler hors de ses frontières habituelles, c’est aussi apprendre à voler de ses propres ailes et à tisser des liens avec des gens différents. C’est l’occasion rêvée de bâtir sa résilience personnelle sans le filet de sécurité habituel de sa famille et de ses amis.
Ceux et celles qui ont pris ce risque, ne serait-ce que le temps d’un été, s’empresseront de dire qu’il s’agit souvent d’une expérience déterminante dans leur histoire professionnelle et personnelle. Ceux qui sauront en profiter pleinement en ressortiront grandis, presque toujours plus conscients de leurs objectifs importants et le plus souvent, fiers d’avoir fait ce choix courageux dans leur cheminement de carrière.